Institution

Proposition de création d’un Centre de Recherche en Entrepreneuriat

Publié le 27 novembre 2019
Rédigé par Loredana Cultrera
Dans la perspective de la réorganisation de l'Institut humanOrg et de sa structuration sur la base de centres de recherche, le professeur Alain Finet propose de créer un Centre de recherche spécifiquement dédicacé à la problématique de l'entrepreneuriat.

 Proposition: Pr. Alain Finet

Pour tout renseignement : alain.finet@umons.ac.be

  1. Liminaires

L’Institut humanOrg a décidé au travers de sa dernière Assemblée Générale de fonctionner sur la base d’une agglomération de centres de recherche auxquels un certain nombre de prérogatives seraient associées. L’idée, par cette forme de décentralisation, est de consolider la fédération de personnes au départ d’objets de recherche relativement circonscrits au sens où si des synergies apparaissent entre les centres de manière temporaire ou plus structurelle, il conviendra naturellement de capitaliser au départ de celles-ci.

Si le discours institutionnel – que je porte en tant que président d’humanOrg – a été de limiter le nombre de centres de recherche directement attachés à la structure de l’Institut, il me semble que les deux centres déjà préexistants et inscrits au sein d’humanOrg, à savoir le CERIS et URBAINE, ne sont pas selon moi susceptibles d’accueillir, même avec beaucoup d’imagination et par l’intermédiaire d’un processus d’ouverture, certaines problématiques potentiellement fédératrices de recherche. Dans cette logique, la création d’un centre de recherche spécifiquement dédicacé à la problématique de l’entrepreneuriat en tant qu’entité autonome me semble faire sens pour différentes raisons dérivées de l’analyse de l’environnement concurrentiel et de nos capacités présentes ou futures logées en interne de l’Université.

  1. Positionnement de la démarche dans l’environnement

Tout d’abord, l’entrepreneuriat colle à une réalité sociétale (voire sociologique). Les restructurations orchestrées au sein des entreprises de grande taille ont permis le retour en grâce de la petite entreprise fortement différenciée et influencée par le profil personnel de son dirigeant. Des formes originales de développement peuvent ainsi émerger et remettre en cause les schémas traditionnels de croissance. En quelque sorte, l’entrepreneur peut être envisagé comme un agent du changement social et politique, transformant par ses micro-pratiques des business models désuets.

Ensuite, plusieurs institutions concurrentes géographiquement proches ou plus éloignées développent des activités de recherche en lien avec l’entrepreneuriat, celles-ci se structurant au sein de centres spécifiquement dédicacés. A titre illustratif, le Centre de Recherche PME et d’Entrepreneuriat de l’Université de Liège, le CRECIS (Center for Research in Entrepreneurial Change and Innovation Strategies) émanant de l’UCL et travaillant en partenariat avec deux lieux d’incubation, l’Yncubator à Louvain-la-Neuve et le Student Start Lab à Mons. On peut également citer le Centre de Recherche en Innovation et Entrepreneuriat de l’EM Lyon. Toutes ces structures proposent le développement d’activités pédagogiques et scientifiques à spectre large (organisation d’événements, vecteurs de diffusion spécifiquement orientés vers l’entrepreneuriat, création de réseaux de recherche avec d’autres universités,…). La lecture des différents sites internet de ces structures permet de comprendre l’émulation scientifique engendrée par celles-ci. Il ne s’agirait pas nécessairement de nous différencier sur un créneau bien spécifique, mais simplement de combler un retard en termes de positionnement ;

En outre, l’analyse des tissus industriels démontre la co-existence d’acteurs économiques de taille importante autour desquels gravitent une myriade d’entreprises de plus petite taille, voire de très petite taille. Dans cette optique, une stimulation de certains secteurs d’activités en proposant des solutions innovantes pourrait constituer un point d’appui pour le développement économique territorial. Cela peut se focaliser sur la création d’entreprises, mais pas seulement. En effet, les entreprises en phase de croissance d’une taille intermédiaire sont également en demande de solutions d’accompagnement pour la gestion de leur développement. Et donc, l’entrepreneuriat ne peut se réduire à uniquement à la notion de création, mais également incorporer la perspective d’innovation et, plus largement, de changement ;

Enfin, en fonction du nombre croissant de travaux doctoraux réalisés dans certaines institutions sur cette problématique (tant en prenant appui sur des méthodologies quantitatives que sur des approches qualitatives), l’entrepreneuriat constituerait une communauté de chercheurs scientifiquement autonome et active qui pourrait prétendre au statut de spécialité des Sciences de Gestion.

  1. Positionnement de la démarche dans la capacité stratégique institutionnelle

Tout d’abord, si dans le monde francophone, l’entrepreneuriat se rattache, d’un point de vue académique, principalement aux Sciences de Gestion, il intéresse également d’autres disciplines comme le Droit, la Science Politique, la Sociologie, l’Urbanisme ou encore la Psychologie. Dans cette optique, la création d’un Centre de Recherche en entrepreneuriat ne pourrait que rencontrer les attentes des services de l’Institut humanOrg dont l’assise scientifique permet un rayonnement très large et pluriel. De manière plus spécifique, les principales thématiques en lien avec l’entrepreneuriat portent sur la création d’organisations nouvelles et sur l’accompagnement, avec des compétences distinctives mobilisables dans les champs de la stratégie, de la comptabilité, de la finance, de la gestion des ressources humaines, de l’innovation, de la technologie et du marketing. En complément et en soutien, une attention pourrait être également portée à la décision d’entreprendre sous l’angle de l’intention et du déclenchement, c’est-à-dire du passage à l’acte. Si, classiquement, la recherche en entrepreneuriat a eu tendance à privilégier l’étude de nouvelles organisations, elle pourrait également s’intéresser à l’entrepreneuriat dans des organisations existantes (par exemple, l’intrapreneuriat). A un niveau plus psychologique, l’entrepreneur demeure un objet d’étude privilégié ; les recherches pourraient ainsi questionner les profils entrepreneuriaux (avec une attention toute particulière portée sur le capital cognitif, social et émotionnel de l’entrepreneur), l’éthique de l’entrepreneur ou mettre à jour des figures originales (car malheureusement délaissées) comme l’entrepreneur féminin ou ethnique. Pour toutes les raisons avancées ci-dessus, la problématique semble suffisamment fédératrice pour justifier la création d’un Centre de Recherche spécifiquement dédicacé.

Deuxièmement, au niveau interne, il me semble possible de capitaliser à partir d’activités pédagogiques et scientifiques en lien avec la problématique et déjà logées de manière au sein de certains services académiques.

Tout d’abord, des services académiques se sont spécifiquement focalisés sur l’entrepreneuriat en tant que vecteur de développement pédagogique et /ou scientifique. Je pense naturellement au service CARE (Karin Comblé) et Management Financier et Dynamiques Territoriales qui portent ne serait-ce que dans leur dénomination la composante entrepreneuriale. Le service de Mme Comblé de par les différentes activités pédagogiques soutenues (et notamment par l’intermédiaire de la Chaire Entrepreneuriat en collaboration avec LME) participe de longue date à un effort de conscientisation de l’importance de l’entrepreneuriat au sein de la Faculté Warocqué d’Economie et de Gestion. Les recherches conduites dans son service sur les entreprises familiales renforcent le positionnement scientifique de son service sur ce pôle de recherche. Au sein du service Management Financier et Dynamiques Territoriales, un financement FEDER (programmation 2014-2020) a été obtenu afin de conduire des recherche-intervention au sein d’entreprises en phase de croissance dans le domaine des industries culturelles en créatives. Ce financement a permis l’engagement d’un doctorant dont les travaux devraient conduire à la réalisation d’une thèse de doctorat soutenue dans les années à venir. Un autre financement a été obtenu afin d’essayer de quantifier les retombées économiques en lien avec les espaces ouverts par lesquels transitent des porteurs de projets. D’autres services académiques repris dans l’Institut seraient susceptibles d’être intéressés par ce nouveau lieu de recherche (tant directement dans le domaine des Sciences de Gestion que dans celui de la psychologie). Le capital social construit au départ de ces deux services et les liens sous-jacents tissés avec des entrepreneurs wallons permettraient d’opérationnaliser de manière très rapide les terrains d’investigation potentiellement envisageables dans les recherches conduites.

Ensuite, des liens très forts ont été tissés avec d’autres composantes de l’Université et ont conduit à des subsidiations importantes par la Région et l’Europe (notamment avec numediArt). Le renforcement des liens entre ces différentes parties ne pourrait qu’être créateur de valeur pour l’ensemble de l’institution et accentuerait la crédibilité scientifique des éventuelles motivations pour du subventionnement public et/ou privé dans le futur. En effet, l’agglomération des perspectives techniques et économiques dans le montage des dossiers peut constituer un élément d’arbitrage central dans les soutiens financiers. Si l’institution valide la création d’un Centre de Recherche en Entrepreneuriat, il est évident que les personnes reprises au sein de numediArt et d’inforTech seront conviées à y participer.

En outre, la reformulation des programmes de mastères au sein de la Faculté Warocqué d’Economie et de Gestion couplée à une densification de l’offre d’enseignement à orientation entrepreneuriale dans le Bachelier induisent un renforcement de la filière entrepreneuriale et crée des fenêtres d’opportunités pour le développement de nœuds de recherche. La consolidation de la filière entrepreneuriale pourrait aisément amener, au terme de leur formation, des étudiants à réaliser des travaux de recherche dans le domaine entrepreneurial. Ceux-ci seraient éventuellement susceptibles de permettre la création de spinoff.

Enfin, il me semble possible de capitaliser au départ de DigiStorm et du CLICK (en tant que lieu privilégié de stimulation de l’entrepreneuriat) afin de dynamiser la composante recherche. Les actions préconisées au sein de différents groupes de travail internes à l’Université vont dans ce sens. Si l’entrepreneuriat existe au sein de l’Université sur base de composantes fortes en termes de pédagogique et de développement territorial, la perspective directement scientifique ne me semble pas suffisamment fournie à l’heure actuelle. Si le CLICK et le portefeuille DigiStorm ont permis de créer une identité entrepreneuriale pour notre université, il me semble pertinent que ces lieux permettent également une dynamisation de la recherche en Sciences Humaines.

  1. Gouvernance, structuration et objectifs

L’adhésion au Centre se ferait sur base individuelle (et pas par service) afin de garantir un niveau de motivation élevé des personnes inscrites au sein de celui-ci. Pour ce qui est de la gouvernance, le Centre serait dirigé par une équipe réduite composée de trois personnes reprises dans le personnel académique et/ou dans le personnel scientifique définitif. Ces personnes seraient désignées pour des mandats de quatre ans. Cette désignation proviendrait d’une décision prise par un Conseil de Direction qui reprendrait tous les membres du Centre (en ce non compris le personnel scientifique non définitif). L’Assemblée Générale comprendrait tous les membres du Centre (en ce compris le personnel scientifique non définitif). Un rapport, réalisé sur base annuelle, sera rédigé par les membres exécutifs et présentés à l’Assemblée Générale. Les lignes directrices et les modalités de fonctionnement seraient définies par les membres du Conseil de Direction.

Les objectifs qui pourraient être assignés au Centre sont de divers ordres et seraient susceptibles d’évoluer en fonction des contingences contextuelles ; on peut penser à l’organisation de journées d’échange avec les acteurs entrepreneuriaux, la création de vecteurs de diffusion de la recherche en entrepreneuriat, la consolidation des relations avec les opérateurs économiques wallons, le renforcement des liens avec d’autres unités de recherche internes et externes à l’Université, le montage (avec le soutien de l’AVRE) de dossiers pour l’octroi de financements internes à l’Université ou externes,…