La nostalgie soviétique sur scène
La nostalgie soviétique sur scène
Repère rédigé par Grigoryan David, Joyeux Théotime et Lambert Damien, deuxième Bachelier de la Faculté de Traduction et d’Interprétation – Ecole d’Interprètes Internationaux de l’Université de Mons, sous la direction de Anne Delizée.
En Russie post-soviétique, des idées « fabriquées en URSS » sont glorifiées en chanson, lesquelles idolâtrent un passé pourtant tumultueux et affectent la perception de l’Occident pour une frange de la population russe.
C’est avec des airs d’anachronisme qu’en 2012 et pourtant sous les drapeaux de l’URSS, l’artiste patriote russe, Oleg Gazmanov, et son public chantaient à l’unisson : « Ukraine, Crimée, Biélorussie, Moldavie. C’est mon pays » dans le titre « Sdelan v SSSR1 » (« Fabriqué en URSS »). En mars 2022, pour fêter le huitième anniversaire de l’annexion de la Crimée et en pleine invasion du reste de l’Ukraine par les forces russes, Gazmanov et son public reprenaient une nouvelle fois ces paroles.
Un article de Radio France rapporte que le chanteur souhaiterait uniquement rappeler la grandeur de l’URSS. Cependant, ce point de vue semble difficile à croire pour les Européens au vu de la situation géopolitique actuelle. Côté russe, en tout cas, la nostalgie de l’Empire soviétique reste omniprésente dans certains esprits.
Gloire à Lénine et Staline
La chanson de Gazmanov dépeint l’époque soviétique en évoquant également le KGB, Lénine, ou encore Staline, des symboles ne représentant rien de positif aux yeux occidentaux. De surcroît, vanter Staline perpétue le culte de la personnalité voué à ce dernier qui est responsable de la mort de millions de personnes (Les Génocides de Staline, Norman M. Naimark). Le culte voué au Petit Père des peuples entre même en contradiction avec l’histoire soviétique étant donné que, sous Khrouchtchev, l’on s’est efforcé à le démythifier.
Il conviendra de souligner que « Fabriqué en URSS » n’est pas un cas isolé. L’on pourrait en effet citer d’autres chansons patriotiques à l’instar de « Vpered Rossia2 » (« En avant la Russie ») du même artiste, mais aussi « Davaï za3 » (« Buvons pour ») du groupe Lioubè en hommage aux parachutistes russes déployés pendant la guerre de Tchétchénie.
Cette habitude d’idéaliser un passé sombre est devenue un outil permettant de défendre une identité fragilisée aux yeux des Russes. En effet, la chute de l’Union soviétique en 1991 a provoqué un traumatisme dans l’imaginaire collectif. Ce traumatisme est d’ailleurs symptomatique du sentiment de la forteresse assiégée – idée selon laquelle le monde entier voudrait nuire à la Russie. Aussi, cette amertume a-t-elle suscité et renforcé une grande méfiance à l’égard de l’Occident. Le rapprochement de l’OTAN des frontières russes est en effet perçu comme une menace majeure.