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L’UMONS parmi les dix universités belges signataires d’un appel à l’Union européenne pour suspendre l’accord d’association avec Israël

Publié le 20 juin 2025
Rédigé par Christophe Morel
Dans une déclaration coordonnée par conjointement par le Conseil des rectrices et recteurs (CRef) et le Conseil interuniversitaire flamand (VLIR), dix universités belges, dont l'UMONS, appellent l’Union européenne et ses États membres à suspendre immédiatement l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, en raison de violations graves et répétées des droits humains.

Au président du Conseil européen,
Au président de la Commission européenne,
Au haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité,
Aux premiers ministres de tous les États membres de l’UE,
Aux ministres des affaires étrangères de tous les États membres de l’UE,

Le 20 mai, le Conseil des affaires étrangères de l’Union européenne s’est réuni pour discuter du respect par Israël des conditions de l’article 2 de l’accord d’association avec l’Union européenne. Il y a plus de vingt ans, cet article a été intégré à l’accord afin de placer les valeurs telles que les droits humains, la démocratie et l’État de droit au cœur de la politique étrangère de l’UE. En tant qu’universités belges, nous nous réjouissons qu’une large majorité se soit prononcée en faveur d’un réexamen du respect par Israël de l’article 2. La Haute Représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, a conclu : « Nous allons donc lancer cet exercice et, en attendant, il revient à Israël de débloquer l’aide humanitaire. Sauver des vies doit être notre priorité absolue ».

Un mois après cette réunion du Conseil, l’accord d’association reste en vigueur. En tant qu’universités belges, nous réitérons notre appel à une action immédiate. L’article 2 n’est pas une clause technique, mais un principe fondamental : le respect des droits humains et des principes démocratiques est la base même de la coopération avec les pays tiers. Si cette base est systématiquement violée, cela doit avoir des conséquences. Sinon, nos traités européens risquent de devenir des mots creux.

Depuis des mois, Israël mène une offensive militaire dévastatrice à Gaza. Les images et les chiffres parlent d’eux-mêmes : des dizaines de milliers de victimes civiles, la destruction systématique des infrastructures civiles, des blocus de l’aide humanitaire et une famine croissante. Parallèlement, la répression en Cisjordanie occupée se poursuit sans relâche : démolitions de maisons, arrestations arbitraires, attaques violentes de colons et expansion des colonies illégales. Divers rapports des Nations Unies et d’organisations de défense des droits humains ont largement et sans équivoque documenté ces violations. La Cour internationale de justice a déjà statué qu’Israël devait prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les Palestiniens de la bande de Gaza du risque de génocide en garantissant des services de base adéquats et l’aide humanitaire.

Malgré ces violations, l’Europe continue de reconnaître Israël comme un partenaire à part entière dans le cadre de l’accord bilatéral d’association. En tant qu’universités, nous sommes de plus en plus confrontées à cette contradiction. Cela signifie, entre autres, que les institutions académiques israéliennes — même celles faisant partie de l’État ou collaborant avec l’appareil militaire israélien — peuvent participer au programme européen de recherche et d’innovation Horizon Europe. Les organisations participantes sont censées, en vertu de l’article 14 du modèle d’accord, agir conformément aux « normes éthiques les plus élevées » et aux valeurs fondamentales de l’UE : respect de la dignité humaine, liberté, démocratie, égalité, état de droit et droits humains. En théorie, cela est clair. En pratique, c’est problématique.

Face aux atrocités commises dans les territoires palestiniens occupés, les universités belges ont à plusieurs reprises demandé à la Commission européenne de mettre en place un cadre d’évaluation éthique transparent et efficace. Un tel cadre permettrait d’évaluer si le contenu des projets de recherche présente un risque de violations des droits humains, et si les partenaires du projet sont complices de telles violations. À ce jour, la réponse de la Commission reste limitée à une lecture minimaliste de l’article 14 : les comportements structurellement contraires à l’éthique d’une institution partenaire sont ignorés, seuls les risques inhérents au contenu du projet sont examinés. Nous appelons donc d’urgence la Commission à agir rapidement.

Les universités belges investissent massivement dans l’évaluation éthique, mais elles ne disposent pas du levier nécessaire pour traduire ces conclusions en actions concrètes. Le retrait unilatéral de consortiums ou — si nécessaire — l’exclusion de partenaires israéliens de projets approuvés entraîne une insécurité juridique, des demandes potentielles d’indemnisation et des dommages à la réputation. Sans cadre européen clair, il est presque impossible de justifier légalement des choix moralement responsables.

Dans la situation actuelle, qui ne cesse de se détériorer, nous appelons l’Union européenne et les États membres à suspendre l’accord d’association avec Israël. Suspendre l’accord n’est pas une demande extrême. Soyons clairs : nous ne remettons pas en cause le droit d’Israël à se défendre ; ce que nous dénonçons, c’est que cela donne lieu à des horreurs déshumanisantes et à des violations aussi graves des droits humains. C’est la conséquence logique des dispositions du traité lui-même. L’article 2 stipule que la coopération est « essentiellement fondée » sur le respect des droits humains. Si cette condition est systématiquement violée par le partenaire d’association, alors la suspension n’est pas seulement politiquement nécessaire, mais aussi juridiquement justifiée.

Nous exhortons la Commission européenne et les États membres à suspendre l’accord d’association sans délai supplémentaire. Nous demandons également à la Commission européenne de commencer à développer un cadre structurel, indépendant et transparent pour l’évaluation des droits humains dans toutes les collaborations internationales dans le cadre d’Horizon Europe et d’autres programmes européens. Les universités belges sont prêtes à partager leur expérience et à contribuer de manière constructive à des solutions. Mais cela nécessite des choix politiques clairs.

L’Union européenne ne peut préserver son autorité morale que si elle prend au sérieux ses propres valeurs — même si cela peut être inconfortable. Tenir Israël pour responsable de violations continues des droits humains n’est pas une position idéologique, mais une nécessité morale et juridique.

Signataires

  • Universiteit Antwerpen

  • Université libre de Bruxelles

  • Vrije Universiteit Brussel

  • Universiteit Gent

  • Universiteit Hasselt

  • KU Leuven

  • Université de Liège

  • UC Louvain

  • Université de Mons

  • Université de Namur

Pour accéder à l’appel porté conjointement par le CRef et le VLIR, comprenant le lien pour la signature de la déclaration, c’est ici.