défense de la dissertation de doctorat de Monsieur Jérémy Théry

Quand ?
Le 06 décembre 2023

Organisé par

Faculté des Sciences

Titre de la dissertation: « Effets des microplastiques biodégradables et non biodégradables sur le microbiote d’ Eurytemora affinis ».

Promoteurs de thèse: Monsieur Jean-Marie Raquez et Mme Samira Bénali (co-promoteur)

Résumé de la dissertation: Durant cette thèse, l’ingestion et l’impact des différents types de microplastiques (MPs) ont été étudiés sur le copépode Eurytemora affinis, espèce clé de voute de l’estuaire de la Seine.Généralement, les effets des MPs sur le modèle copépode, est étudié via l’utilisation de MPs fluorescents. Cependant, cette méthode présente des limitations lorsqu’il s’agit d’étudier des MPs échantillonnés en milieu naturel, qui ne sont pas fluorescents et qui présentent une large diversité de forme, de taille, de nature et de couleur. De plus, les méthodes classiques d’analyse présentent une limite de détection à quelques micromètres, inapplicable aux MPs de petites tailles échantillonnés en milieu naturel. A l’aide de cultures de masse du copépode Eurytemora affinis, nous avons développé une méthodologie de caractérisation des MPs ingérés par cette espèce, à la fois plus sensible (en limitant l’altération des MPs) et davantage indépendante de la nature des MPs. Pour cela, les copépodes subissent dans un premier temps une digestion enzymatique à la protéinase K puis sont filtrés sur filtre en polycarbonate, avant caractérisation des MPs par spectroscopie Raman. Le couplage de ces méthodes nous a permis de diminuer de 7µm (relevé dans la littérature) à 1µm la limite de détection des MPs. Cette méthodologie, appliquée à des copépodes prélevés dans l’estuaire de la Seine, a montré chez ces individus sauvages des concentrations en MPs supérieures à ceux relevées chez d’autres espèces sans que cela ne soit lié à une concentration plus importante en MPs dans le biotope. Ce résultat suggère donc une sous-estimation, dans les précédentes études, de la contamination en MPs ingéré par les copépodes à cause des limites de détection des méthodes utilisées.Plusieurs études ont montré la toxicité et/ou l’impact négatif des MPs sur les espèces aquatiques. Afin de lutter contre cette pollution et de diminuer la contamination en déchets plastique dans les milieux, les industriels tendent à proposer sur le marché de nouveaux plastiques dégradables en compost industriel. L’étude de leur degré de biodégradabilité en milieu naturel, et notamment marin demeure cependant limitée. Par ailleurs, de nombreuses études ont démontré que les plastiques représentaient un support pour de nombreux microorganismes, parfois pathogènes ou, au contraire, possédant des enzymes capables de dégrader ces plastiques. Afin de clarifier l’impact des plastiques considérés comme biodégradables par rapport aux plastiques persistants, nous avons réalisé une double expérimentation en laboratoire de simulation de vieillissement de MPs compostables (polybutylène adipate téréphtalate – PBAT) et non compostables (polyéthylène basse densité – LDPE) durant 120 jours. Les modifications chimiques des deux types de plastiques au cours du temps ont été analysés par TGA, DSC et FTIR., tandis que les successions des communautés bactériennes à leurs surfaces ont été analysées par séquençage haut débit de l’ARNr 16S. Nos résultats montrent que le vieillissement n’affecte que légèrement la cristallinité du LDPE lors du vieillissement en présence de colonies bactériennes, suggérant une dégradation quasi nulle des deux types de plastique dans nos conditions. Concernant les successions microbiennes, une dynamique a pu être identifiée tout au long de nos différentes dates de prélèvements. Cette dynamique était statistiquement liée à la durée du vieillissement mais n’était pas liée à la nature du plastique. Des espèces indicatrices de chaque type de MPs ont cependant pu être mises en évidences. Une seconde expérimentation visait à exposer à des concentrations similaires à celles trouvées dans l’environnement, en continu, et sur plusieurs générations, le copépode E. affinis avec les mêmes MPs vieillis. L’impact de cette exposition sur le microbiote du copépode a été analysé par séquençage à haut débit de l’ARNr 16S. Nos résultats montrent que les deux types de MPs (PBAT et LDPE) affectent significativement la composition du microbiote d’E. affinis, et ce, sous leur forme vierge ou vieillie. Nos résultats ont également montré que le type de MPs (biodégradable ou non) n’avait pas d’impact significatif sur le microbiote d’E. affinis.En conclusion, nos recherches indiquent une biodégradabilité très faible du PBAT lorsqu’il séjourne dans des conditions non optimales pour sa dégradation, et ce même lorsqu’il se trouve sous forme de MPs de quelques micromètres. De plus, les communautés bactériennes attachées à sa surface des MPs ne semblent pas liées à la nature du plastique. Enfin, l’exposition multigénérationnelle d’E. affinis aux MPs a montré un impact significatif sur le microbiote du copépode, mais indépendant du type de plastique. Ces conclusions semblent indiquer que le PBAT n’est potentiellement pas le meilleur plastique compostable à considérer afin de diminuer l’impact de la pollution plastique sur les biotopes et les biocénoses.