Défense publique de la dissertation de doctorat de Kimberly Przybyla

Quand ?
Le 03 juillet 2024
Où ?
Campus Plaine de Nimy - Centre Vésale - Aud. La Fontaine

Organisé par

Faculté des Sciences

Titre de la dissertation: Effets des facteurs environnementaux sur la qualité spermatique des mâles de bourdons : Mécanismes et implications pour leur conservation

Résumé de la dissertation: Les bourdons sont des insectes sociaux qui jouent un rôle crucial dans la pollinisation des plantes à fleurs, contribuant ainsi à la reproduction de nombreuses espèces végétales et au maintien de la biodiversité. Ils sont ainsi des insectes pollinisateurs essentiels pour le bon fonctionnement des écosystèmes, y compris nos écosystèmes agricoles. Cependant, depuis quelques années, ils font l’objet de préoccupations majeures en raison de leur déclin à travers le monde. Les facteurs à l’origine de ce déclin sont multiples : le réchauffement climatique, y compris l’augmentation des évènements climatiques extrêmes, la fragmentation et la perte d’habitat, l’intensification des pratiques agricoles comme l’utilisation excessive de pesticides. La plupart du temps ces facteurs agissent en synergie entre eux provoquant des effets négatifs plus importants.Pour mettre en place des actions de conservation efficaces, il est crucial de bien caractériser et de comprendre les effets (sub)-létaux de ces facteurs. De nombreuses études sont faites depuis plusieurs années mais elles ne portent principalement que sur les reines et ouvrières des bourdons. Pourtant, les bourdons mâles, eux aussi potentiellement fragilisés, jouent un rôle crucial dans la pérennité des espèces. En particulier, les facteurs de déclin peuvent avoir des effets négatifs sur les cellules reproductrices, les spermatozoïdes, des bourdons, ce qui peut impacter leur pouvoir reproducteur et donc l’ensemble des populations. Cette thèse explore les potentiels effets négatifs de différents stress environnementaux (stress thermique et stress de pesticides) sur les spermatozoïdes ainsi que sur la capacité reproductrice des bourdons mâles de différentes espèces présentes en Belgique ainsi que leur résilience, et ce, notamment par des processus protéomiques.Dans le premier chapitre nous avons pu évaluer, en conditions contrôlées, les effets d’un stress hyperthermique statique de 40°C simulant une canicule sur la qualité spermatique (viabilité et qualité de l’ADN des spermatozoïdes) de trois espèces retrouvées en Belgique : B. terrestris (considéré comme thermorésistante), B. magnus et B. jonellus (considérés comme thermosensibles). Si nous retrouvons une viabilité spermatique basale identique chez les espèces, une différence significative est observée après stress thermique avec une viabilité qui arrive à près de 20% chez nos espèces thermosensibles et à 65% chez B. terrestris. De plus, la qualité de l’ADN spermatique diminue aussi à la suite d’un stress thermique et ce de manière plus importante chez l’espèce sensible B. jonellus que chez l’espèce résistante B. terrestris.Dans un second chapitre, nous avons complété l’étude des potentiels impacts de stress thermique (identique que dans le premier chapitre) sur la fertilité des mâles de bourdons mais cette fois nous avons considéré l’impact sur l’attractivité et les capacités reproductives des males de B. terrestris. Nous avons trouvé que les reines ne faisaient aucune distinction entre des mâles stressés ou non, et les colonies issues de reines fécondées par des mâles de B. terrestris soumis à un stress thermique montrent les mêmes performances que des colonies contrôles. En plus de l’absence d’impact sur les spermatozoïdes eux-mêmes (chapitre 1), nous n’avons donc observé aucune différence significative en termes de succès reproducteur et d’attractivité après stress thermique.

Dans le troisième chapitre nous nous sommes intéressés aux capacités de résistance de B. terrestris par des analyses protéomiques de l’hémolymphe et du liquide séminal des mâles. En comparant notre espèce thermosensible, B. magnus, avec B. terrestris il apparait que ce dernier possède un bagage protéique autant au niveau de son hémolymphe circulante qu’au niveau du liquide séminale plus important en termes de protéines associées à de la résistance thermique, de l’immunité, ce qui expliquerait sa plus haute résistance aux conditions stressantes (chapitres 1 et 2).Dans les deux derniers chapitres de la thèse, nous avons étudié, en plus d’un stress, un stress chimique sur la fertilité des mâles. Dans le quatrième chapitre nous avons analysé comment une exposition aux pesticides, isolée ou en combinaison avec un stress thermique, de manière contrôlée en laboratoire, impactait la qualité spermatique chez l’espèce modèle, B. terrestris. Contrairement à l’hypothèse de base, aucune différence notable dans la qualité spermatique n’apparaît après analyse, soulignant une nouvelle fois les capacités de résistante importantes de B. terrestris. La viabilité et la qualité de l’ADN spermatique des mâles analysés étaient similaire entre nos traitements.Dans le dernier chapitre, nous avons analysé la qualité spermatique, sur des mâles des cinq espèces de bourdons les plus communes en Belgique (B. pascurorum, B. terrestris, B. hypnorum, B. lapidarius et B. pratorum) collectés en nature, dans cinq sites repris en Belgique afin de déterminer si les conditions environnementales pouvaient être corrélées à leur qualité spermatique et donc à leur fertilité. Après analyse des espèces, il apparait que B. pascuorum possède une qualité spermatique inférieure aux autres espèces, ce qui pourrait indiquer une stratégie de reproduction différente des autres espèces. En comparant les sites, il semblerait que le facteur qui influence négativement la qualité spermatique des bourdons soit les températures extrêmes. Ces analyses préliminaires pourraient suggérer que les bourdons se distribuant dans les sites subissant fréquemment des canicules seraient les plus en danger au niveau de leur capacité reproductrice.Globalement, nos résultats montrent des différences interspécifiques significatives quant à la résistance thermique des mâles de bourdons. Ces résultats confirment nos hypothèses et certaines modélisations qui montrent des espèces survivant mieux aux changements climatiques déjà engendrés que d’autres. Nous avons permis, grâce à cette thèse, de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents de ces résistances variables. Cette thèse ouvre la voie à de futures investigations dans le domaine de la conservation des pollinisateurs notamment l’étude du protéome comme facteur explicatif de la capacité de résistance spécifique aux stress environnementaux des bourdons dans le contexte actuel des changements globaux. De plus, nous ouvrons la voie à l’utilisation d’autres espèces modèles pour les études axées sur la conservation des espèces afin de rendre compte de la diversité physiologique au sein d’un groupe homogène en apparence comme les bourdons.

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