Le Progrès technoscientifique nous rend-il plus heureux ?
Docteur en Philosophie et en Droit, Guy Haarscher a emprunté le chemin de la philosophie par vocation. Aujourd’hui devenu professeur ordinaire émérite à l’ULB, cet homme d’expérience est venu partager un savoir inépuisable avec les étudiants de l’Ecole de Droit et quelques citoyens de la Ville de Mons.
Croyons-nous toujours au Progrès ? Le Progrès incontestable des techniques et des sciences entraîne-t-il des améliorations sur les plans moral, politique, juridique ? Le Progrès de l’humanité associé au progrès techno-scientifique nous rend-il plus heureux ? Le Professeur a développé un raisonnement très structuré en commençant par définir la notion de Progrès : un changement pour un mieux relatif à la valeur que l’on veut défendre.
Le progrès de la médecine, de l’hygiène, de l’informatique, de l’économie, du confort,… n’est pas niable, mais les conséquences de ces progrès sont-elles positives ? « La science et la technique progressent mais nous ne sommes pas certains que ça ne va pas virer au cauchemar avec les problèmes que l’on connaît actuellement : pollution, réchauffement climatique, surconsommation, biodiversité,… ». Descartes pensait déjà que la science aiderait les hommes à mieux vivre. Le fait que l’humain perfectionne le monde a permis à l’Europe, à un moment donné, d’asseoir une supériorité matérielle. « De manière globale, ceux qui veulent accomplir le mal ont plus d’aisance à le faire grâce à ces progrès en techno-sciences. Par exemple, le totalitarisme a été favorisé par les moyens de communication et de propagande ». Mais finalement, qu’attend-on du progrès technique ? Un confort matériel pour mieux vivre (électricité, soins médicaux,…) ? « Le progrès d’une démocratie réelle est extraordinaire. Ça nous paraît une évidence aujourd’hui mais ça n’a pas toujours existé ! »
Finalement, l’homme moderne est-il heureux ? Pas nécessairement ! « Est-ce que les hommes aiment la liberté ? Nous n’aimons pas que les autres décident à notre place et avons peur de décider, par peur de nous tromper ». La pollution, les dangers du nucléaire, les atteintes à l’environnement,…alimentent les inquiétudes du Progrès qui, à leur tour, nourrissent les discours des fondamentalistes. Dans certains pays où s’exerce une répression politico-religieuse aucune dynamique de la science et de l’humanité ne se crée. « Sans Progrès, nous faisons face à des problèmes redoutables ! ».
Après un débat passionnant sur la motivation démocratique des citoyens et les limites à la révolution technologique entre autres, les discussions se sont poursuivies autour d’un verre.