Après-midi thématique Droit romain, édition 2015
Comme c’est de coutume depuis maintenant trois ans, l’Ecole de Droit de l’Université de Mons, avec comme partenaire l’Université libre de Bruxelles, ont organisé une après-midi thématique de Droit romain sur le thème « Miscellanea ». Ça c’est passé ce mercredi 21 octobre 2015, dans les locaux de l’UMONS.
A l’initiative de Patrick Vassart, enseignant à l’Université de Mons (Faculté Warocqué d’Economie et de Gestion et Ecole de Droit), quatre orateurs ont croisé leurs connaissances et leurs points de vue devant un parterre d’étudiants en Droit venus en nombre pour l’occasion.
Werner de Saeger (maître de conférences à l’ULB et à l’UMONS, enseignant à Oxford), Aurélie Lebel (enseignante à l’ULB et à l’UMONS et avocate au barreau de Lille), Patrick Vassart (enseignant à l’ULB et à l’UMONS et avocat au barreau de Bruxelles) et Laurent Waelkens (professeur ordinaire à la KUL) se sont succédé au pupitre.
3 questions à Patrick Vassart
- Etymologiquement Miscellanea signifie mélange et diversité, n’est-ce pas là un paradoxe de considérer ce terme comme un seul thème pour cette après-midi thématique ?
P. Vassart : Le Droit romain traverse le temps et l’espace en un ensemble qui le distingue radicalement de l’histoire du droit : une source constante de notions et de méthodes pour les législateurs, une grille de compréhension de cités et sociétés si diverses auxquelles il a offert un socle juridique de vie en commun. Le titre ‘Miscellanea’, en son paradoxe, s’attache à refléter quelques aspects de cette variété de situations et relations humaines qui nous apparaissent bien mieux intelligibles à la lumière de sources romaines dont l’étude, la compréhension et l’influence se renouvellent à chaque génération.
- Quatre intervenants étaient présents ce jour-là et ont croisé leurs idées… en résumé, que peut-on en retenir ? Quelle a été la nature de ces réflexions croisées ? Quels ont été les grands sujets traités ?
P. Vassart : Le professeur Waelkens a éclairé d’un jour nouveau la notion romaine de la servitude à partir du moment où une condition juridique la structure et la perpétue : moins le droit du maître sur l’esclave que le droit à son vécu (véritable sens du ‘ius uitae’…), avec les paradoxes d’une intégration au groupe de la familia qui peut s’avérer le creuset de la liberté espérée ou, au minimum, montrer les prémices d’une sécurité sociale.
Le professeur de Saeger a illustré la puissance politique de la notion même d’acte juridique en évoquant la célèbre ‘Donation de Constantin’ : de quelle manière la revendication d’un pouvoir temporel par le Saint Siège au Moyen-Age a-t-elle pu emprunter la voie d’une prétendue libéralité de l’empereur qui avait pris l’Edit de tolérance en 313 ?
Le professeur Lebel a rendu hommage à l’imagination juridique des Officialités : d’un lien conjugal sans acte juridique en droit romain, devenu ensuite le sacrement spirituel et temporel du mariage, comment atténuer la rigueur et la double consécration ? Par la tolérance d’une ‘séparation d’habitation’, en une notion que l’érudition de l’oratrice nous a révélée et présentée comme une innovation issue de la fécondité juridique de juridictions ecclésiastiques plus subtiles que leurs homologues civiles.
Il a paru utile de concourir à ces différents aspects de l’imagination et de l’inventivité en droit en évoquant le rapport spécifique au droit des aspects légendaires de l’histoire de Rome : les récits mythiques et les faits ont une égale légitimité à éclairer l’histoire des normes de la vie en société dès lors que les légendes sont elles-mêmes les faits bruts de l’histoire des mentalités.
- De nombreux étudiants ont participé à l’événement… en tant qu’enseignant de Droit romain, comment parvenez-vous à les encourager à assister à un tel colloque ? Quel lien peuvent-ils faire avec leur domaine d’études ?
P. Vassart : Comme l’a indiqué Ch. Thomasset lors d’une transition entre exposés, il faut toujours renouveler l’invitation à cette dimension essentielle de l’enseignement : ‘savoir d’où nous venons pour tenter de comprendre, voire choisir où nous allons.’ En dépit de tant d’incertitudes et de contraintes qui peuvent parfois affecter leur disponibilité à l’exploration de l’horizon culturel de leurs études, les étudiants savent faire preuve d’une roborative curiosité intellectuelle et ne demandent qu’à être étonnés de dimensions inattendues des matières qu’ils découvrent : face à cette demande potentielle de découvertes, c’est avant tout aux enseignements qu’il revient de tracer les chemins de l’information.
L’après-midi thématique s’est terminée par un verre convivial entre les participants.