Stress parental : une étude de l’UMONS révèle le rôle clé de la mémoire des parents
Les colères, l’opposition ou l’agressivité des jeunes enfants sont autant de défis du quotidien pour les parents. De nombreuses recherches ont déjà montré que ces comportements externalisés sont associés à un stress parental élevé. La plupart des études se sont toutefois concentrées sur les pratiques éducatives comme facteur explicatif. Or, une autre piste mérite l’attention : la manière dont les parents interprètent et retiennent en mémoire les comportements de leur enfant.
Selon les modèles cognitifs du stress, des biais attentionnels (tendance à focaliser sur les aspects négatifs) ou mnésiques (tendance à se souvenir des événements négatifs) pourraient renforcer le sentiment de surcharge parentale. C’est précisément ce qu’ont voulu explorer Sarah Galdiolo (UMONS), Pierre Philippot, Mandy Rossignol (UMONS), Emilie Jacobs et Isabelle Roskam dans une étude récemment publiée dans la revue Current Psychology.
L’étude visait d’abord à vérifier si les parents d’enfants présentant davantage de comportements externalisés manifestaient des biais attentionnels ou mnésiques. Le deuxième objectif consistait à déterminer si ces biais pouvaient expliquer – autrement dit jouer un rôle de médiateur – le lien entre comportements de l’enfant et stress parental. Enfin, les chercheurs souhaitaient examiner les éventuelles différences entre mères et pères, ainsi que l’existence d’effets croisés au sein du couple.
Une enquête auprès de 43 couples
Quarante-trois couples hétérosexuels, parents d’enfants âgés de 3 à 6 ans, ont participé à la recherche. Ces derniers ont rempli des questionnaires sur le comportement de leur enfant et leur propre niveau de stress, puis se sont prêtés à des tâches informatisées permettant d’évaluer leur attention et leur mémoire vis-à-vis d’images et de mots liés à des comportements positifs ou négatifs d’enfants.
Contrairement à l’hypothèse initiale, aucun biais attentionnel n’a été observé : les parents ne semblaient pas orienter automatiquement leur regard vers les comportements négatifs. En revanche, des biais mnésiques sont bien apparus. Les parents dont l’enfant présentait davantage de comportements difficiles retenaient préférentiellement les souvenirs négatifs. Ces biais de mémoire expliquent en partie pourquoi ces comportements entraînent un stress parental accru.
Un résultat marquant concerne les différences de genre : l’effet médiateur des biais mnésiques a été particulièrement observé chez les pères. Ceux-ci se souvenaient davantage des épisodes négatifs, ce qui nourrissait directement leur stress. Chez les mères, ce mécanisme n’a pas été constaté. Par ailleurs, aucune contamination croisée claire entre partenaires n’a été mise en évidence, même si les perceptions paternelles semblaient parfois influencer indirectement les mères.
Ces résultats rappellent que le stress parental ne dépend pas uniquement de la réalité des comportements de l’enfant, mais aussi de la façon dont ils sont perçus et mémorisés. Les chercheurs suggèrent que des interventions centrées sur la modification de ces biais pourraient être bénéfiques, en particulier pour les pères.
Des pistes prometteuses incluent des programmes d’entraînement visant à repérer et valoriser les comportements positifs, des approches narratives permettant d’équilibrer le souvenir des épisodes familiaux ou encore des techniques cognitivo-comportementales pour corriger les pensées automatiques biaisées. L’enjeu est d’apprendre à porter un regard plus nuancé sur l’enfant afin de réduire le stress parental et de favoriser une relation familiale plus harmonieuse.
En mettant en lumière le rôle central de la mémoire sélective, cette recherche enrichit notre compréhension du stress parental et attire l’attention sur la nécessité de cibler aussi les processus cognitifs des parents. Plus qu’un simple enjeu éducatif, il s’agit d’un véritable levier pour améliorer le bien-être familial.
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