Jacques De Decker, disparition d’un traducteur-enseignant qui a inspiré des centaines d’étudiants de l’EII
L’Université de Mons et sa Faculté de Traduction et d’Interprétation – EII ont perdu, le 12 avril dernier, à l’âge de 74 ans, un de leurs plus éminents membres de leur communauté en la personne de M. Jacques De Decker.
De nombreux médias ont rendu hommage à celui qui fut jusque fin 2019 le secrétaire perpétuel de l’Académie de langue et littérature françaises mais qui fut aussi enseignant au sein de l’Ecole d’Interprètes Internationaux.
Critique littéraire (il fut rédacteur en chef des pages littéraires du journal « Le Soir »), romancier, nouvelliste, dramaturge, librettiste, essayiste, critique, biographe, adaptateur, scénariste, chroniqueur, professeur, Jacques De Decker était un talent protéiforme, un véritable touche-à-tout.
Traducteur internationalement reconnu (l’écrivain Amin Maalouf, entre autres, fut très peiné par sa disparition), il était aussi un enseignant passionné de l’EII, du temps où celle-ci n’était pas encore devenue Faculté de Traduction et d’Interprétation. Il en fut une des figures majeures du département de néerlandais et l’un des instigateurs des spectacles polyglottes dès les années septante.
Né à Bruxelles dans une famille bilingue dont le père était artiste peintre, Jacques De Decker était avant tout un de ces Bruxellois polyglottes qui, dès le plus jeune âge, s’est montré particulièrement à l’aise avec les mots et l’apprentissage des langues.
Après des études de philologie germanique (ULB), il avait enseigné la traduction au sein de l’EII où il demeure l’un des précurseurs de la traductologie. M. De Decker avait alors opté pour l’EII qui figurait, avec Genève, Anvers et Trieste parmi les meilleures institutions d’enseignement de cette double discipline de la traduction et de l’interprétation.
« A l’EII, Jacques De Decker a été non seulement un pédagogue érudit, intelligent et passionnant pour les étudiants à qui il transmettait sa passion de la culture et de la littérature néerlandaises et flamandes, mais, pour l’ensemble de l’école il était aussi ce dynamique animateur d’événements qu’il inventait, comme les représentations en première mondiale d’un spectacle « Molière polyglotte » ou des rencontres qu’il organisait et animait. Je conserve encore le souvenir stimulant d’une rencontre avec Georges Belmont et Hortense Chabrier qu’il avait invités pour nous parler de leur traduction d’ « Orange mécanique », d’ Anthony Burgess », se souvient Jean Jauniaux, lui-même écrivain et journaliste, et qui fut l’un de ses étudiants entre 1970 et 1974.
Difficile en tous cas pour celles et ceux qui l‘ont côtoyé, à l’EII ou dans les autres institutions où il a enseigné, de parvenir à décrire pleinement l’inspiration que Jacques De Decker parvint à insuffler durant sa carrière à des centaines d’étudiants, par ses improvisations et son érudition, l’élégance de sa pensée, intelligible et accessible, sans concession à l’exigence et à l’esprit critique.
(*) Ce court texte en mémoire de M. De Decker a pu être rédigé grâce à l’apport précieux de Mme Thilde Barboni et M. Jean Jauniaux qui l’ont tous deux bien connu.